Fantome d'Etaine
Il ne reste plus rien. Rien à part la neige, et quelques pierres écroulées. Des ruines de village, des lambeaux de villes, des souvenirs froissés. Peut-on réellement qualifier ceci des souvenirs, même, alors que plus personne n’est vivant pour se rappeler ?
Le royaume en proie au froid, et l’hiver recouvrant tout. Il est venu, un jour, et a fondu sur le monde telle une vague. Tempête de blanc sur le gris de la pierre, qui suivait le nuage d’oiseaux noirs missionnés pour mener Étaìne à sa perte. Effacé, le royaume. Endormies, ses puissances souterraines. Disparus, ses dirigeants et ses Ovates. Ces derniers, les prêtres voués à la cause de leur nation, puisant leur sagesse dans les rêves, ont résisté longtemps ; ils se sont battus jusqu’au bout, ont persisté, ont tenu leur pays à bout de bras. Ils ont échoué, bien entendu. Car aujourd’hui, ils n’existent qu’à l’état de fantômes.
Les esprits errent entre les ruines, les colonnes effondrées de leurs temples, les rues dévastées de leurs villes. Ils ont oublié pourquoi. Ils entendent encore les murmures d’Étaìne, les voix sous le sol, mais ils ne les comprennent pas. Bientôt, ils s’effaceront eux aussi, emportés ailleurs, et il ne restera que l’hiver et le silence d’un monde éteint, comme tous ceux qui les entourent. Ils espèrent qu’on les rallume et les réveille, mais en attendant, ils dorment de leur sommeil de pierre.